Izi Glicksmann
La présentation de la biographie d’Izi (Isek, Iszek, Isi) Glicksman(n) nécessite quelques explications préalables : contrairement aux autres enfants dont les biographies figurent dans ce travail de recherche mémoriel, le jeune garçon n’est pas mentionné sur la plaque apposée dans le couloir de l’abbaye du lycée Fabert, pas plus que son nom ne figure d’ailleurs sur l’impressionnante liste de plus de 1000 enfants juifs lorrains déportés et assassinés dans les centres de mise à mort nazis qui a été dévoilée le 15 mars 2023 devant le rectorat de l’académie de Nancy-Metz.
C’est d’abord dans des documents d’archive provenant d’Angoulême, sur une liste portant les noms de près de quatre-cents Juifs raflés dans la ville le 8 octobre 1942, que nous avons rencontré Izi Glicksman. Il était, avant la rafle, domicilié à la même adresse que la famille d’une petite fille, elle-même ancienne élève du lycée de Metz, Mathilde Feingrutz, dont nous avons reconstitué la biographie en 2022.
Nous savions par la liste des juifs raflés à Angoulême, qu’Izi était originaire de la même petite ville de Pologne que la maman de Mathilde et nous avions alors supposé que cette origine géographique commune permettait d’expliquer que la solidarité ait joué entre ce jeune homme et la famille Feingrutz, qui se seraient retrouvés à la même adresse dans leur exil forcé.
En septembre 2024, en parcourant les fascicules de remise de prix conservés dans le bureau du Proviseur du lycée, nous avons retrouvé ce même nom : Izi Glicksman. Si le patronyme est assez courant, en revanche ce prénom paraît relativement rare et cela nous a amené à pousser plus loin les recherches sur cet enfant qui n’était jusqu’alors pas identifié parmi les élèves du lycée victimes de l’anéantissement voulu par les nazis.
Nous avons pu, grâce aux archives départementales de la Moselle, retrouver quelques documents attestant effectivement à la fois de sa fréquentation de l’établissement et des liens de cet Izi (ou Izsek) Glicksman avec la famille de la petite Mathilde Feingrutz, ce qui nous a permis d’aboutir à la reconstitution d’un début de biographie sommaire sur cet enfant.
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Ses
origines familiales
Izi Glicksman était né le 4 octobre 1924 ( certains actes- notamment un acte provisoire de naissance établi le 25 septembre 1931 pour l’inscription au lycée- donnent aussi la date du 22 septembre 1924) dans la localité de Szczercow (ou Szczeresow), une commune rurale de la Voïvodie de Łódź en Pologne ; il était de nationalité polonaise.


Ses parents étaient Mordka Glicksman, qui exerçait la profession de tailleur, et Ryvka Mittelman.
La mère d’Izi était donc une sœur de Rajzel Mittelmann, maman de la petite Mathilde Feingrutz, une autre ancienne élève de notre lycée à laquelle nous consacrons une biographie.
A la page 10 du dossier de naturalisation (août 1930) puis dénaturalisation (juillet 1943) des parents de Mathilde, conservé aux Archives Nationales, site de Pierrefite (BB/27/1429), on apprend que Ryvka (Régine) vivait encore en Pologne en 1930.
Il est donc vraisemblable que le garçonnet et ses parents arrivèrent en France, à Metz, en 1931.
La fiche domiciliaire d’Izi, conservée aux archives municipales de Metz mentionne une première adresse à partir du 20 septembre 1931 au n°28 en Vincentrue, chez Feingrutz, avant un déménagement le 31 août 1937 au 20 rue des Jardins (qui est l’adresse de la « chemiserie Tango », société dont est propriétaire Mordka Feingrutz).

Cette fiche, établie après 1937, nous donne à voir qu’Izi, âgé de moins de quinze ans, était alors seul, il y est mentionné en tant qu’écolier, hébergé chez les Feingrutz, alors que ses parents sont « à Paris ».
Alors que le jeune garçon est en classe de 10°, un courrier adressé au directeur du lycée le 16 février 1932 par Monsieur Feingrutz, nous apprend à la fois que les parents d’Izi ont des difficultés financières et que le papa de Mathilde est « l’oncle et le tuteur de cet élève », assumant tous les frais liés à sa scolarité.

On peut donc supposer qu’à cette date déjà Mordka et Ryvka Glicksman étaient partis pour Paris, laissant leur fils aux bons soins de la famille de sa tante.

- Sa scolarité
C’est aussi pour l’année 1931, qui est très probablement celle de son arrivée en France, que nous possédons le formulaire d’inscription du jeune garçon dans les classes enfantines, en 11ème, au lycée de garçons de Metz (futur lycée Fabert).
Le domicile qui y est mentionné est celui de la famille Feingrutz, 28 en Vincentrue.
On y apprend que le père d’Izi était tailleur, ce qui était une profession très répandue chez les Juifs originaires de Pologne installés en France dans l’entre deux guerres.
Dans la mesure où Mordka Feingrutz, oncle d’Izi et donc beau-frère de Mordka, était propriétaire d’une société de « confection de lingerie pour homme sur mesure » et « fabrication de chemises pour hommes en tous genres et tissus » comme il est mentionné sur l’en-tête du papier à lettres qu’il utilise pour sa correspondance avec le lycée, on peut légitimement supposer que Mordka Glicksmann a dû être, un temps au moins, employé par Monsieur Feingrutz.
Les fascicules de remise de prix du lycée pour les petites classes (équivalent de notre école primaire) nous laissent entrevoir un élève brillant, cumulant prix et accessits dans de nombreuses disciplines entre les classes de 11° et de 7°.

En classe de 11ème lors de la distribution solennelle des prix du mercredi 13 juillet 1932, il reçoit ainsi un prix de tableau d’honneur et un prix d’accessit.
L’année suivante, au petit lycée, en classe de 10e B, le 13 juillet 1933 il reçoit de nombreux prix et mentions, dans diverses disciplines (prix de tableau d’honneur, accessits en exercices français et lecture, premier prix en calcul, mentions en histoire, géographie, récitation, écriture et dessin).
Il apparaît également dans l’édition du 14 juillet 1933 du journal local, Le Messin, qui rend compte de la distribution des prix au lycée. (source : gallica.bnf.fr)
En revanche, une fois dans les classes de lycée ses résultats s’effondrent : s’ils demeurent convenables en mathématiques, ils sont insuffisants dans les autres matières, au point qu’il est obligé de subir un examen pour passer en classe de quatrième.

Nous sommes alors à la fin de l’année scolaire 1937-1938.
Nous possédons un dernier document mosellan sur ce jeune garçon : le 16 juin 1939, Mordka Feingrutz, son oncle et tuteur, adresse un courrier au Proviseur, demandant l’établissement d’un certificat portant la date de son entrée au lycée dans l’objectif de « lui faire établir une carte d’identité ».

- Izi à Angoulême, la rafle du 8 octobre 1942
Il a très certainement suivi ensuite le parcours de la famille de sa cousine Mathilde entre Metz et Angoulême.
C’est d’ailleurs certainement d’Izi dont fait état la petite Charlotte Schuhman dans une lettre qu’elle adresse depuis Angoulême a la tante en juin 1943. Il y écrit, en effet : « je n’ai toujours aucune nouvelle de mes chers parents […]. La famille Feingrutz nen n’a pas non plus de leur fils ». Pour la jeune fille, originaire elle aussi de Metz, ce garçon qui vivait chez les Feingrutz à Angoulême, qui vivait déjà chez eux à Metz avant guerre, ne pouvait être que leur fils, qui, comme nous allons le voir, a été raflé le 8 octobre 1942 en même temps que les parents de Charlotte et a partagé ensuite leur funeste destin.
On retrouve son nom dans le fichier des Juifs étrangers à Angoulême établi pour l’année 1940-1941, au domicile des Feingrutz, au 37 boulevard Denfert-Rochereau.
Ce fichier est le résultat d’une ordonnance publiée par les autorités allemandes le 27 septembre 1940 : le Militärbefehlshaber (commandement militaire) y ordonnait aux Juifs de la zone Nord (Français et étrangers) de se faire recenser avant le 20 octobre.
Le lieu de résidence des Juifs était donc connu, de même que leur nationalité (en tête du document sur lequel figure le nom d’Izi, on peut lire « polonais »), ce qui, par la suite, a grandement « facilité » la tâche à ceux qui étaient chargés de les arrêter avant leur déportation.
C’est effectivement au domicile des Feingrutz, qu’Izi est appréhendé par les forces de l’ordre françaises lors de la rafle d’Angoulême le 8 octobre 1942.
Selon
l’historien Alexandre Doulut
cette rafle, comme toutes celles d’octobre 1942, s’inscrit dans
un contexte bien précis et dans un « quota » de Juifs à
déporter depuis la France.
Il y eut, en effet, deux rafles en zone occupée en juillet et octobre 1942.
Le 11 juin 1942, Adolf Eichmann, lors d’une conférence organisée a Berlin, avait donné le chiffre de 100 000 juifs français à déporter à Auschwitz. Quelques jours plus tard, Théo Dannecker chef du service des affaires juives de la Gestapo en France occupée de l’été 1940 à l’été 1942, considéré par S. Klarsfeld comme « le véritable architecte de l’infrastructure anti-juive en France », élabore un premier programme de 39 000 juifs à déporter en trois mois (soit 58% du nombre estimé de Juifs résidant en zone occupée). Cette rapidité a deux objectifs : débarrasser la zone côtière des Juifs et surtout faire place nette en zone occupée pour pouvoir se « consacrer » aux Juifs de Paris, nettement plus nombreux. Le 30 juin 1942, Eichmann, en visite à Paris, annonce vouloir « épurer d’une façon absolue la province de tous les Juifs afin qu’il n’en reste qu’à paris d’où ils seront finalement déportés ». Ce « programme trop ambitieux » (A.Doulut) est cependant compromis à l’issue de plusieurs réunions entre René Bousquet, secrétaire général de la police du gouvernement de Vichy, et les responsables allemands : finalement tous les Juifs apatrides et étrangers peuvent être arrêtés, mais pas les Juifs français. Néanmoins, Dannecker dans une note du 6 juillet 1942, écrit : « Bousquet déclare que lors du récent conseil des ministres, le maréchal Pétain, chef de l’État, ainsi que le président Laval avaient souscrit à la déportation, pour commencer, de tous les juifs apatrides des zones occupées et non occupées »… On appréciera le « pour commencer » !
Ainsi, en juillet 1942, au lieu des six trains prévus au départ de la zone occupée, un seul part d’Angers pour Auschwitz le 20 juillet : c’est le convoi n°8, qui emporte vers le centre de mise à mort d’Auschwitz un millier de Juifs étrangers, dont d’anciens élèves du Lycée Fabert qui étaient internés au camp de la Lande (Max Moszkowicz, Hermann Rosenbach), avec l’ajout d’au moins deux-cent juifs français théoriquement exemptés de déportation à cette date, parmi lesquels un autre ancien élève de notre établissement, André Abraham Lévy. Dans le même temps, à Paris les 16 et 17 juillet 1942, la rafle du Vel’ d’Hiv’ ne donne pas non plus les résultats escomptés par les autorités d’occupation5, pas plus que la rafle du 19 juillet à Nancy.
Cette « inefficacité » des rafles de juillet 1942 débouche sur une nouvelle vague d’arrestations en octobre.
La rafle d’octobre découle d’un ordre direct d’Helmut Knochen distribué à tous les Kommandos de la Sipo-SD en zone occupée le 6 octobre. Chargé d’implanter en France occupée les service nazis, H. Knochen, au service du RSHA (office central de la sûreté du Reich créé en 1939 par la fusion de la Sipo et du SD), était à la tête d’une vingtaine d’hommes, spécialement chargés de suivre les opposants au régime, les Juifs, les communistes et les Francs-maçons. La nomination en France en mars 1942 de Carl Oberg en qualité de chef suprême de la SS et de la police lui a permis de donner la pleine mesure de ses « talents » politiques. Il joue alors la carte de la collaboration, qui lui permet de pallier les faibles effectifs à sa disposition et de tenir les programmes nazis (notamment celui de l’anéantissement des Juifs) ; il est aussi l’un des architectes essentiels des accords Oberg-Bousquet, qui mettent les forces de police et de gendarmerie française à disposition de l’occupant.
L’ordre que Knochen donne le 6 octobre 1942 est précis : il s’agit d’arrêter les Juifs belges, hollandais, roumains, bulgares, yougoslaves et les ressortissants des nationalités visées en juillet 1942 (donc, entre autres, les Polonais) mais cette fois sans limite d’âge. Les listes d’arrestations, transmise aux policiers et gendarmes français, sont dressées par les gestapistes à partir des fichiers juifs tenus dans les préfectures.
En application de l’ordre écrit par Knochen le 6 octobre, le commandant la police allemande à Poitiers avait donc ordonné l’arrestation de tous les Juifs étrangers et apatrides. Chaque personne peut emporter deux couvertures, deux paires de souliers, et un peu de nourriture ainsi que le strict nécessaire de toilette.
Les bureaux régionaux de la Sipo-SD dépêchent les ordres d’arrestation aux préfets régionaux de la zone occupée. Le préfet Alfred Papinot avait alors réquisitionné les forces de police et de gendarmerie pour exécuter les ordres de l’occupant. Les Juifs sont arrêtés à leur domicile et acheminés vers des centres de rassemblement. Le préfet régional de Poitiers avait reçu l’ordre de rassembler les Juifs dans deux centres : le camp transit de Limoges, situé près de Poitiers, ainsi que dans la ville d’Angoulême.
Mathilde et ses parents ne sont pas inquiétés : Mordka et Rajzel Feingrutz ont été naturalisés en 1930 (et finalement dénaturalisés par le régime de Vichy en 1943) et la fillette (Mathilde a alors 11 ans), née à Metz en 1931 de parents français, est de nationalité française. Il n’en est pas de même d’Izi, né en Pologne en 1924, qui a été recensé en 1940 en tant que « Polonais ».
Lors de la rafle (que les Angoumoisins qualifient de « Vel’d’Hiv’ d’Angoulême ») entre les 8 et 10 octobre 1942, quatre-cent-quarante-deux Juifs sont arrêtés et enfermés dans la salle philharmonique : hommes, femmes, enfants, vieillards, malades se côtoient pendant plusieurs jours, sur de la paille que la préfecture avait fait livrer quelques jours plus tôt, avec pour seul équipement d’hygiène trois toilettes et trois robinets d’eau froide.
Les enfants nés en France donc de nationalité française, non déportables à cette date, sont séparés de leurs parents et ce sont finalement 389 Juifs, parmi lesquels Izi Glicksman, âgé de 18 ans, de nationalité polonaise, qui sont conduits à la gare d’Angoulême puis transportés en train jusqu’à Drancy.
On ne peut qu’imaginer ce qu’a pu ressentir le jeune homme âgé de 18 ans : séparé de la famille qui avait pris soin de lui depuis 1932 au moins, seul parmi près de 400 personnes promises à un avenir très incertain. D’autres Glicksman étaient au nombre des Juifs raflés à Angoulême, puis transférés à Drancy, Moszek et son épouse Jacheta. Peut-être étaient-ils des parents éloignés d’Izi auprès desquels il a pu trouver un peu de réconfort ?
De même d’autres familles juives originaires de Metz, dont certaines avaient des enfants scolarisés eux aussi au lycée Fabert, se sont trouvées dans la salle philharmonique d’Angoulême, puis à Drancy en même temps qu’Izi : les familles Brzezinski, Hochberg, Manheim, Schuhmann, Tabak… Izi n’était donc peut-être pas tout à fait seul pour traverser ces épreuves qui devaient le mener à la mort.
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Drancy,
la déportation
A Drancy, l’espoir était encore possible, des rumeurs contradictoires circulant, à ce moment là, à propos de la destination des convois.
Au début de l’hiver 1942 d’ailleurs, un article illustré du Pariser Zeitung devait être lu dans toutes les chambres. Il décrivait de manière idyllique l’existence des Juifs censés être réinstallés à l’Est, quelque part en Pologne. Il se terminait par une interview, inventée pour les besoins de la propagande, d’un jeune garçon déporté de Drancy début 1942. G.Wellers, interné a Drancy témoigne : « on ne prit au sérieux ni l’article, ni les photos, ni l’interview. On les considérait comme exagération et généralisation de la propagande allemande. Mais on voulait y voir tout de même une part de vérité, du moins on ne voulait ni ne pouvait croire aux exterminations de masse dont parlait la radio anglaise ».
Le 30 octobre, E. Röthke envoie à H. Knochen un rapport résumant les arrestations effectuées en zone occupée. Il précise que 1965 Juifs ont été arrêtés et il demande que l’on prévoie le départ de trois convois pour Auschwitz, pendant les dix premiers jours du mois de novembre. Chaque convoi doit contenir entre 800 et 1000 Juifs. Le 31 octobre Röthke rapporte à Eichmann, en poste à Berlin, que quelques semaines plus tard il y aurait 3000 Juifs internés au camp de Drancy et qu’il envisageait le départ de trois convois, les 4, 6 et 9 novembre. Ces départs sont autorisés le 2 novembre, par Rolf Günther, adjoint d’Eichmann.

Le fichier de Drancy et les listes du convoi de déportation nous apprennent qu’Izi, « hébergé » dans l’escalier 1 du camp de transit, en est parti le 3 novembre 1942 pour être déporté le jour suivant par le convoi n°40.
Une fiche au nom d'Izi est également présente dans le « fichier général » des Juifs de la préfecture de police de Paris. A côté de personnes recensées en 1940, le fichier comprenait, en effet, les personnes arrêtées en province passées par Drancy jusqu'en juin 1943.

Les juifs raflés en octobre 1942 sont donc déportés de Drancy par trois convois les 4, 6 et 9 novembre.
Izi est mentionné sur la liste de déportation du 3 novembre 1942 conservée au Mémorial de l’Holocauste à Washington. On y apprend que les raflés d’Angoulême, « hébergés » dans l’escalier 1, quittent le camp de transit le 3 octobre.
Embarqué dans les wagons du convoi, le millier de Juifs compagnons d’infortune d’Izi passe une première nuit dans l’inconfort le plus total alors que le train reste à quai à la gare du Bourget-Drancy.
Hans Catz, un juif de nationalité hollandaise arrêté sur la ligne de démarcation, un des neuf survivants du convoi 40 (il a réussi à s’en évader avec son frère), témoigne sur les conditions de déportation dans lesquelles se fait l’attente du départ: « Ce ne paraissait pas terrible. Le plancher de bois était propre… Ce qui nous préoccupait le plus c’était évidemment les fenêtres. Il y avait deux ouvertures horizontales à peu près un mètre cinquante du plancher… Nous avons cru que ça serait facile de s’évader… On pouvait également ramper dans la voiture à l’échelle menée à la voiture du chef de train, dans le fond du wagon. Je me suis précipité pour trouver une place à côté d’une fenêtre. C’est-à-dire que je me suis rendu là (à la fenêtre) et j’ai déclaré que c’était ma place. Dans un coin il y avait des pains et des boîtes de conserve. Nous étions 55 dans la voiture. Au centre, il y avait un seau rempli d’eau, mais comme il n’y avait pas de seau hygiénique nous avons utilisé une boîte de biscuits pour nos besoins. Nous avons cru que le train partirait bientôt et que nous nous évasions le soir même, mais sept heures plus tard il faisait déjà noir et le train restait toujours immobile. Le départ s’est fait seulement le lendemain. Cette nuit fut extrêmement méprisable. On ne pouvait s’asseoir sans s’engourdir tout le corps. J’ai essayé de me mettre debout à côté de la fenêtre en raison de la puanteur. Les gens se sont plaint que je bloquais l'entrée de l’air dans la voiture. Tous ceux qui essayaient de se rendre aux toilettes la nuit devaient trouver leur chemin avec les mains afin d’éviter de toucher les femmes assises à côté de la boîte… Le matin, nous tentions de mieux nous organiser. Nous avons réarrangé les valises pour que les gens puissent s’asseoir dessus. Chaque déporté avait une gorgée d’eau. Le train partit, nous ne savions pas vers où il serait dirigé . »
https://collections.yadvashem.org/en/library/0085103
Une nouvelle liste (qui nous a été communiquée par le Mémorial de Washington) est établie et le convoi n°40 quitte finalement la gare le 4 novembre 1942 à 8h55
Dans ce convoi, qui suit le cheminement habituel, passant par Metz vraisemblablement vers 21h50, 1000 déportés Juifs étrangers ou apatrides, dont environ 400 enfants.
À l’arrivée sur la Judenrampe de Birkenau, 269 hommes et 92 femmes sont sélectionnés pour le travail forcé. Ce nombre indique qu’il n’y a pas eu de sélection préalable à Kosel, avant l’arrivée à Auschwitz, comme pour les convois précédents, depuis le 26 août 1942. Les autres, 639 personnes, sont immédiatement gazés.
Izi Glicksman était parmi eux ; il est officiellement déclaré mort en déportation le 9 novembre 1942 à Auschwitz, par un arrêté publié le 7 janvier 2017 au JORF.
Il n’y avait en 1945 que quatre survivants du convoi n°40
Izi Glicksman sur le Mur des Noms au Mémorial de la Shoah à Paris.
Izi Glicksman dans le « livre des noms » au pavillon israélien (pavillon 27) du Musée d'Etat d'Auschwitz.